au dix septième
Au début du 16°
siècle, la région lorraine n'est encore qu'un enchevêtrement
de petits états (Duché de Lorraine, Evêché et République de Metz)
dans lesquels sont enclavées des possessions étrangères ; tous font partie du Saint empire
germanique
Chaussy (Chaulcy) est le siège de
l'église mère dont dépendent plusieurs églises annexes. Elle relève du chapitre
de METZ et figure parmi les bénéfices à
la collation du doyen de la cathédrale.
Le hameau de Chaussy est à cette époque plus important que celui de
Courcelles dont il est séparé par la
route de METZ, mais cette situation va
progressivement s'inverser par l'effet des différents mouvements de la réforme.
Dans la première moitié du 16°
siècle les idées de Luther et de Calvin qui veulent réformer l'Eglise pénètrent en Lorraine où, à l'exception de
la cité de METZ, elles sont mal
accueillies. Dans le duché de Lorraine,
le duc Antoine choisit sans hésiter de conserver pour lui et ses sujets la foi
catholique. Dès 1542 il interdit par ordonnance d'enseigner les doctrines de
Luther et de détenir ses livres; les contrevenants risquent l'inquisition et la confiscation de leurs biens.
Le
protestantisme finit néanmoins par
gagner très lentement quelques messins.
Des familles patriciennes (Nicolle, Esch, Heu..) et de l'ancienne
chevalerie (les du Chatelet, Haraucourt, Saulxures.) ainsi que quelques
seigneurs voisins (Nassau-Sarrebruck, Deux Ponts) se laissent
progressivement convaincre.
La même année, l'Eglise est fondée à METZ
selon le modèle que Calvin vient de proposer à Strasbourg. Mais après l'affaire de Gorze, en octobre 1543, « tout exercice de
la religion, hors la catholique » est interdite à METZ. Les réformés, encouragés par les lettres de
Farel et de Calvin, se réunissent alors
secrètement et le mouvement s'étend progressivement au pays messin.
En 1545, Catherine de Heu, future dame de
Courcelles, qui n'a que 8 ans, est
fiancée à Claude Antoine de Vienne de 2
ans son aîné.
Elle est issue, par la branche paternelle,
d'une ancienne famille originaire du
pays de Liège qui a donné 8 maîtres-échevins à la République messine.
Ralliée à
la réforme depuis 1540 les Heu, qui avaient pour devise « Endurer pour
durer », possédaient de nombreux biens dans tout le pays messin et plus
particulièrement dans le « Haut Chemin »
Par la branche maternelle, Catherine
descend des Chaverson, famille
patricienne qu'on retrouve à METZ dès
1250 et dont sont également issus plusieurs maîtres-échevins. Sa mère,
Philippine de Chaverson fille unique de
Michel et de Gertude de Gournay, dame
de Goin et de Grimont, possédait en
propre la seigneurie de Montoy.
En 1552, le pays messin sert à nouveau de champ de bataille à la rivalité du roi de France et de
l'Empereur Charles-Quint. Le siège de la ville (d'octobre à janvier 1553)
assure définitivement au Royaume de France la possession de METZ et du Pays
Messin dont les hameaux de Chaussy et
de Courcelles sont encore exclus pour quelque décennies.
La mort d'Henri II, marque point de
départ d'une guerre de religion qui
durant 30 ans va ravager le royaume et c'est à cette époque qu'une communauté
huguenote voit le jour à Courcelles.
Il faut encore attendre la mort de
François II, le 5 décembre 1560, pour que le mouvement d'adhésion à la réforme
commence à toucher pratiquement toutes
les couches de la population. Antoine de Bourbon, duc de Vendôme et roi de
Navarre, son frère Louis de Condé, les trois frères Chatillon : François
d'Andelot, l'amiral de Coligny et Odet de Chatillon, évêque de Beauvais, membre
du Sacré Collège, se convertissent à leur tour.
Deux ans plus tard, l'Edit de Saint
Germain donne l'entière liberté de
culte aux protestants en dehors des villes et l'autorisation de réunir des
synodes. De plus, les pasteurs sont reconnus dès lors qu'ils prêtent serment
aux autorités et pour la première fois il est fait mention légalement de la
religion réformée.
Le mouvement prend alors des proportions
considérables dans le pays messin et des écoles sont créées là où les
communautés se structurent et notamment à Courcelles.
Le pasteur François
Christophe à la charge des communautés de la campagne et en particulier de
celle de Courcelles où des services réguliers sont alors vraisemblablement
tenus dans le château.
Mais avec la défaite de Jarnac en 1569
débute à nouveau une longue période durant laquelle les interdictions succèdent
aux tolérances. Courcelles n'est pas touché par l'Edit rendu à cette occasion
et les protestants messins dont le temple a été démoli obtiennent du gouverneur que les baptêmes et
les mariages « à l'exception de toute autre acte ni prêche, ni cène et sans pouvoir y admettre
plus de 6 personnes y soient autorisés ». Cette tolérance reçoit l'approbation
officielle du roi, faisant ainsi de
Courcelles le centre de la vie protestante au pays messin.
C'est vraisemblablement pour tirer parti
de la situation juridique de Courcelles, qui ne relève ni de METZ, ni de
l'Evêché, qu'en 1571, Claude Antoine de Vienne comte de Clervant en fait
l'acquisition des mains des seigneurs en indivis, le comte de Nassau et le baron
de Créhange.
Né en 1553 à Domangevelle (Hte Sâone)
Claude Antoine de Vienne descend d'une vieille famille bourguignonne dont le
père a servi l'empereur Charles Quint. Sa mère, Claudine du Chastelet est la
fille de Erard et de Nicole de
Lenoncourt. Elle est apparentée à la Maison de Lorraine notamment Robert de
Lenoncourt(Evêque de
METZ
Il a épousé Catherine de Heu le 18 avril
1553, dans la ville épiscopale de Vic-sur-Seille.
Par ce mariage de convenance, célébré en grande pompe par son
oncle l'évêque Robert de Lenoncourt, Catherine
lui apporte de nombreuses propriétés du pays messin, la
seigneurie de Montoy et l'hôtel de Chaverson à METZ où ils ont vécu avant de s'installer au château de
Montoy.
Rallié à la réforme depuis 1557, il se dépense sans compter pour sa foi ; tantôt diplomate,
tantôt soldat il participe, aux côtés du futur Henri IV dont il est le conseiller,
à la lutte que ce dernier conduit à la tête des troupes huguenotes. En 1578, il est dit Sénéchal et Chambellan
héréditaire de l'évêché de METZ, Haut,
moyen et bas justicier de Retonfey, Chaussy, Urville, Courcelles et Frécourt
Sous la pression des catholiques de
Chaussy l'application de l'ordonnance du 20 avril 1571 autorisant l'exercice
complet du culte à Courcelles est reportée au 10 mai 1571. Clervant refuse de se soumettre « ne
voulant laisser passer aucun moyen d'avancer la religion commande comme
seigneur de Courcelles, et en rappelant
que ce village n'est pas sous la juridiction de METZ, au ministre de tenir sa
prêche », ce qui est fait. Cet acte d'insubordination lui vaut d'être
arrêté dans son château de Montoy et détenu durant 8 jours sur ordre du
Gouverneur.
Mais grâce à l'influence acquise par l'amiral de Coligny auprès de Charles
IX, les événements prennent une tournure plus favorable aux réformés et par
lettre patente du roi, en date du 14 octobre1571, les protestants du pays
messin obtiennent le droit de célébrer toutes les cérémonies du culte dans le
château du Comte de Clervant à Montoy.
L'arrivée du Cardinal de Retz, un des
instigateurs de la sanglante nuit du 24 au 25 Août 1572, marque le départ des
pasteurs de METZ et de Courcelles ainsi qu'une nouvelle période d'interdictions
obligeant les réformés à se rendre à Altviller (propriété du Comte de
Nassau-Sarrebruck) ou à Jametz (place
huguenote) tant pour leurs
besoins religieux que les mariages et les baptêmes.
En réaction le Comte de Clervant se
démarque à nouveau et installe, au profit des fidèles du pays messin, son
propre ministre dans son fief particulier de Burtoncourt.
En
1577 lors de la suppression de l'abbaye de Neumünster
Clervant acquiert la moitié de la seigneurie de Silly-sur-
Nied La paix de Beaulieu est assez favorable
aux protestants et en 1578, Clervant obtient l'autorisation du roi de faire revenir « Maître Nicole » à Courcelles. Deux ans plus tard, le village devient le centre religieux où se rassemblent tous
les protestants du pays messin car les services ont été à nouveau suspendus à
Montoy.
L'importance de Courcelles ne cesse de
croître. En 1585 Catherine de Heu y
accueille les protestants messins obligés de quitter la ville suite à la
promulgation de l'Edit du 18 juillet 1585 proscrivant le calivisme et
prononçant la mort et la confiscation des biens à l'égard des
contrevenants.
Le 20 octobre, le maire et le pasteur Philippe Maillard de Courcelles refusent
de s'incliner e affirmant « que n'étant pas sous la juridiction de
METZ, l'ordre ne s'applique pas eux « Les choses en reste là et le
village de Courcelles devient du même coup
le principal lieu de refuge
des protestants venant du pays messin, de Lorraine, de Suisse voire de beaucoup
plus loin.
Le duc d'Epernon qui avait jusqu'à là fait
preuve d'une certaine mansuétude à l'égard des réformés les reçoit le 2 janvier
1586 et leur annonce que le roi leur permet de célébrer « à leur
plaisir à Courcelles leur culte et cérémonies religieuses ». Mais fin
octobre, devant les menaces du Gouverneur, M. de la Verrière, Catherine de Heu
transporte à nouveau son ministre à Burtoncourt.
Dans le même temps, Henri III s'allie à la
Ligue et commande au duc de Joyeuse de prendre la tête de l'armée royale et de
marcher contre les huguenots. En juin 1587, le Comte de Clervant se joint au détachement du duc de Bouillon avec lequel
il renforce l'armée que le comte
palatin Casimir a réuni en Allemagne pour secourir le Béarnais.
La chronique dit : « Le
dimanche 28 juin cette troupe passe à Pont-à-Chaussy la rivière Nied. Ils
étaient environ tant de gens de cheval que de gens de pieds 2500 hommes. Il y
avait beaucoup de gentilhommes de marque entre autre. Mr de Mouy, les seigneurs
de Givry et de Montmartin. Beaucoup de bourgeois et de jeunes gens de la
religion réformée tant de METZ que d'alentour se joignirent avec ces troupes
outre qu'auparavant partis en Allemagne »
Les deux camps se rencontrent à Coutras le
20 octobre 1587, et bien que très supérieure en nombre, l'armée royale est
battue laissant 5000 tués et 500 prisonniers.
Henri de Navarre y fait des
prodiges mais au lieu de poursuivre les fugitifs et de rejoindre l'armée de
Casimir, il fait demi-tour pour retrouver sa maîtresse Corisandre puis se
retire en Béarn.
Après quelques revers c'est la bataille
d'Auneau où l'armée de secours du Comte
von Dohma est défaite le 24.11.1587 par celle du duc de Guise. La plupart des
chefs huguenots ne survivent pas à ce désastre et meurent d'épuisement ou de
chagrin. Clervant, qui avait déjà connu
l'humiliation de la défaite à la bataille de Dormans en septembre 1575, est du
nombre; il s'éteint quelques mois plus
tard au château de Châteauvieux.
Henri de Guise, se rue alors sur le
Wurtemberg puis vient à Courcelles foyer principal de l'hérésie en pays messin
où : « ses gens causèrent partout la désolation. Il firent à Courcelles
en particulier un tel dégâts et s'y comportèrent avec une telle cruauté que les
habitants de tout âge et de tout sexe s'enfuirent, laissant leurs biens et leur
maison à la merci du soldat ».
En
1601, trois ans après la proclamation des Edits de Senlis et de Nantes reconnaissant
la liberté du culte, l'église réformée de Courcelles, qui avait tenu une place
importante tant dans le pays messin qu'en Lorraine, se retrouve sans pasteur et
devient une filiale de celle de METZ.
C'est également à METZ, en l'hôtel de
Chaverson que s'éteint en 1606 la dame de Clervant. Sa fille Nicole, unique
héritière, obtient entre autres les
châteaux de Montoy et de Grimont, des droits en totalité ou partie de 21
seigneuries du pays messin, ainsi que plusieurs moulins, fours, étangs, vignes,
des dîmes et loyers.
L'expansion du hameau de
Courcelles (avec Frécourt), qui comptait à cette époque cinquante ménages contre
douze pour Chaussy (avec Urville), va
encore se poursuivre tout au long du
dix septième siècle.
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